Vers le pays rouge

(Rivière Blanche)
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Alors je me suis mise debout, et j'ai regardé le fleuve. Même lui n'avait rien pu faire contre mes souvenirs. Je pensais que tu partirais avec moi, en buvant. L'eau a tout emporté, mais toi, tu es resté. Cette fois-ci c'est moi qui t'abandonne, cette fois-ci c'est toi qui restes derrière. Alors je regarde les ombres pâles qui y nagent. L'une d'elle est montée vers moi. C'était une femme. Je l'ai vue passer, non pas d'ombres et de reflets comme je le pensais, mais de chairs mortes et glacées, mortes comme la neige au creux des montagnes. Et j'ai compris que vous étiez là, tous, que ce qui restait de vous nageait là, silencieux et immobile, au gré des courants. Justine Niogret n'a pas besoin de subterfuges. Elle n'avance pas masquée. Elle prend les songes à bras-le-corps, les étreint, danse avec eux. Y ajoute de la sueur, du sang et des larmes. Et peut-être d'autres substances moins avouables, aussi, avec cette manière qui n'appartient qu'à elle de donner du corps aux rêves et de convoquer nos démons familiers. De son premier recueil de nouvelles Et toujours, le bruit de l'orage, épuisé depuis de longues années, devenu ce Vers le pays rouge, on retrouve la même force, la même rage, mais aussi cette façon de toujours toucher la cible au cœur.
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